Base Aérienne BA 110 de CREIL, le point sur les projets de reconversions.
La base BA110 de Creil d’une superficie de 428 hectares est située au nord de paris et s’étend sur trois communes (Creil, Verneuil-en-Hallate et Apremont) dans le département de l’Oise en région Hauts de France.
Les références historiques font état d’une réquisition des installations par les Allemand de 1940 à 1945. L’Armée de l’Air Française s’installera en1951 et ne quittera plus les lieux jusqu’au 31 Août 2016.
La base aéronautique de Creil BA110
Depuis son installation en 1951, la base aura accueilli de nombreux avions mythiques , nous citerons parmi eux le Lioré et Olivier connu sous l’acronyme de LeO-455 en préparation d’une mission photographique pour l’IGN (1950), en Juillet 1955 la 10e Escadre de Chasse accueille les premiers Mystère IIC, un avion complexe à mettre en œuvre et qui sera remplacé par le Mystère IV en 1957, en Janvier 1969 les premiers Mirage IIIC atterrissent à Creil …
Après les attentats de New York en 2001 , deux Mirage 2000 ont stationné à Creil pendant 6 mois puis dès Février 2003, les avions de chasse stationnés à Cambrai prennent leurs quartiers à Creil, la piste ayant été remise en état avec notamment l’installation de 200 balises lumineuses le long de la piste.
Les deux avions de chasse prêt à décoller au titre de la permanence opérationnelle ont pour mission de protéger le territoire et la population des menaces en provenance du ciel. Avec les bases d’Orange BA115, de Saint-Dizier-Robinson BA113 et Mont-de-Marsan BA118 c’est l’ensemble du territoire Français qui est sous protection avec un temps d’intervention sur cible extrêmement cours. Les pilotes sont en combinaison, les avions prêts au décollage, armes embarquées et plein de carburant. Quelques secondes après décollage suffisent pour atteindre plus de 1500 km/h.
En décembre 2015, lors de la COP21, un avion d’affaire en provenance de la Belgique qui avait manifestement mal préparé son vol, se dirigeait vers le Bourget pour s’y poser, or n’étant pas accrédité pour y atterrir ou transiter dans l’espace aérien , un Rafale de la base de Creil l’intercepta pour le dérouter vers Pontoise.
La base accueille également de nombreux services COMS (Centre Militaire d’Observation par Satellite), le CNC (Centre National de Ciblage), l’escadron ETAA qui assure les fonctions de transit personnel et du matériel du ministère de la défense ainsi que des services interarmées comme le DRM (Direction du Renseignement Militaire) , l’EGI (établissement géographique interarmées, l’UFV (l’unité Française de Vérification).
L’UFV pour éclaircir cet acronyme est une unité dont le rôle consiste à vérifier que les engagements des États sur leur armements, leurs désarmements ou le respect des mesures imposées soient respectés afin de maintenir un climat de confiance entre États.
La base BA110 de Creil revêt donc un caractère stratégique et hautement sensible. C’est pour cela que nous ne pourrons vous montrer ici des images prises depuis nos avions voire de drone et on comprend aisément pourquoi.
Le premier et dernier meeting aérien fin Mai 2016 (Meeting du centenaire Creil) viendra clôturer l’activité aérienne de la base.
En application de la Loi de Programmation Militaire 2014-2019, la base aérienne de Creil a été libérée de ses activités aéronautiques militaires le 31 Août 2016 impliquant un redéploiement des forces civiles et militaires, soit environ 500 emplois.
- Le commandement des opérations interarmées , la production cartographique de son centre de renseignement géospatial interarmées ont tous les deux été transférés de Creil à Balard.
- L’ensemble des A400M Atlas ont été regroupés sur la BA 123 d’Orléans
- L’ensemble des cargos légers et moyens, dont les Casa 135, les escadrons de transport « Vercors » , « Ventoux » équipés de Casa et leurs moyens de soutien techniques transférés sur la BA 105 d’Évreux.
- Les aéronefs de transports stratégiques A310 et A340 de l’escadron « Esterel » implantés à Creil sont mis en œuvre depuis l’aéroport de Roissy.
Du coté des activités aéronautiques civiles, l’aéroclub de Creil-Senlis-Chantilly est temporairement délocalisé sur la plate-forme du Plessis-Belleville (LFPP). Même si personne ne nous répond plus, les avions de tourismes s’annoncent sur la fréquence VHF de l’ancienne tour de contrôle 123.300 Mhz afin de se situer dans l’espace.
Un régime d’auto information indispensable pour naviguer dans cette zone pourvu de points d’intérêts exceptionnels (Château de Chantilly) ou simple zone de transit.
Extrait de communication entre l’avion et la tour de contrôle de Creil à l’occasion d’un vol pour Albert-Bray et du passage à la verticale de la base de Creil. (Archives vudavion.tv du 21 Mai 2016)
Les installations depuis Août 2016
Le socle technique et solide, cependant la tour et les hangars qui abritaient les avions militaires ne seraient pas disponibles pour d’éventuelles activités civiles. Ce point peut-il encore évoluer car dans le cas contraire il s’agit d’un handicap certain pour l’accueil immédiat de nouveaux projets. La récupération des hangars de l’IGN resteraient quant à eux envisageable.
La dimension de la piste 07/25 revêt un intérêt particulier de part ses longueurs existantes (07 LDA 2200m, 07-25 TODA 2300m) et son dégagement alentour. Les premiers projets présentés par l’agglomération Creil Sud Oise prévoyait une longueur de piste ramenée à 1700m rejoignant ainsi le groupe des pistes longues du secteur avec Beauvais, Pontoise et Albert Bray. Homologuées IFR ou VFR, si elle est équipée d’aides lumineuses, le terrain pourrait alors s’ouvrir aux vols de nuit, ce qui, dans le secteur reste rare. (Persan, Beauvais, Pontoise … Rouen)
Le nombre important de hangar présents sur le site et à condition que les hangars militaires puissent être affectés aux activités civiles permettrait l’accueil d’aéroclub et de propriétaires privés d’avion et ULM. La location de hangar est relativement onéreuse dans la région parisienne et la plate-forme de CREIL pourrait représenter une réelle opportunité.
Point de situation juillet 2018
Alors la question reste entière, où en sommes-nous à l’été 2018 du transfert de la gestion de la plateforme par l’armée à l’agglomération et des projets de reconversions de la plate-forme ?
Depuis le 31 Aout 2016, date de l’arrêt des activités aéronautiques militaires, l’agglomération de Creil Sud Oise est très active sur ce dossier et s’attache à construire un nouveau projet de maintien d’une activité aéronautique. Un contrat dit « Contrat de Redynamisation d’un Site de Défense (CRSD) a été signé en Juillet 2016, entré en vigueur en octobre 2016 donnant ainsi une capacité de financement de onze million d’euro.
Ce contrat compte de nombreux projets de développements économiques portés par l’État, le Conseil régional Nord Pas de Calais Picardie, le Conseil départemental de l’Oise, le Syndicat Mixte du Parc Alata et des quatre intercommunalités, Communauté de l’Agglomération Creilloise, Communauté de communes de l’Aire cantilienne, Communauté de communes des Trois Forêts, Communauté de communes des Pays d’Oise et d’Halatte qui sont impactés par le départ des militaires.
Parmi ces projets, une étude sur l’opportunité de reconversion des infrastructures aéronautiques de la base.
Projet d’homologation IFR (vol aux instruments)
Parmi tous les projets, une étude de marché a été conduite sur l’opportunité et la faisabilité d’une activité économique aéroportuaire civile mixte. Le projet consiste en premier lieu à homologuer IFR la plate-forme afin d’y accueillir des vols d’affaires, d’y installer une école de pilotage d’Air France le tout dans un mode d’accès restreint à la plate-forme et non ouvert à la circulation aérienne publique.
Ce projet d’école de pilotage fait écho à la relance de la filière de formation d’Air France « pilotes cadets » qui, dès la fin janvier 2018, a lancé un casting national pour recruter 100 nouveaux élèves-pilotes. Cette voie alternative au cursus initial de l’ENAC (École nationale de l’aviation civile) permet d’ouvrir la profession a d’avantages de prétendants, même si les critères de sélections restent strictes, il s’agit d’une véritable opportunité sociale et économique. Air France annonce un objectif de recrutement de 250 pilotes par an jusqu’en 2022.
Une telle école pourrait également motiver le secteur des pilotes privés (PPL) pour qui, la formation IFR reste complexe pour les aéroclubs qui ne disposent pas toujours d’instructeurs et machines qualifiés.
La restriction d’accès à la plate-forme reste un handicap pour son développement , même si ce n’est pas rédhibitoire , l’ouverture à la CAP (circulation aérienne publique) permettrait l’émergence de nouvelles recettes grâce à l’installation de nouveaux aéroclub, la créations d’activités commerciales (restaurations, etc ..) et culturelles.
Les premières conclusions
Le projet initial d’homologation IFR reste pour l’instant à l’arrêt, la DGAC ayant rendu en Juin 2018 un avis défavorable. Avis motivé par un espace arien qu’elle estime saturé et une difficulté d’insertion de l’activité qui impliquerait une reconfiguration de la TMA de Beauvais.
Cette modification de l’espace aérien pourrait être l’une des raisons de l’abandon du projet d’implantation de l’école des Cadets.
La question d’une homologation VFR est également en suspens.
En somme le dossier a été stoppé en juillet 2018 mais rien ne semble définitivement perdu. Le second semestre 2018 devrait permettre d’y voir plus clair sur le devenir des installations aéronautiques de la base BA 110 de CREIL. La mobilisation de l’Agglomération de Creil Sud Oise reste forte, les emplois indirects que représentait l’activité militaire étaient nombreux (estimé à plus de 600) et compenser ce départ est l’un des objectifs avec l’ambition de développer de nouveaux services.
L’idée d’une co-activité civile et militaire sur le site qui est toujours actif et hautement sensible reste à l’évidence un frein. La volonté commune entre l’ensemble des acteurs semble pourtant vouloir aboutir à restaurer des activités économiques mais elles devront être compatibles avec celles du ministère de la défense.
L’un des projets consiste à étendre le parc technologique ALATA de 19 ha dans une première phase, développer une offre d’hébergement pour jeunes chercheurs , création d’une pépinière dédiée à l’écologie industrielle sur l’ancien site de GOSS.
La recherche de projets générateurs d’emplois et de développements économiques sont des priorités pour la région, la plate-forme de CREIL représente un capital technique certain, les autorités militaires et civiles devront s’accorder sur un respect de leurs contraintes et objectifs respectifs, la sureté du territoire et les relais de croissances.
—
Remerciements :
Merci à toutes nos interlocutrices et interlocuteurs, Madame Ludmilla CHAVE, Directrice Générale Adjointe et Directrice du Développement Économique, de l’Emploi et de la Formation de l’Agglomération Creil Sud Oise, l’Armée de l’air, le SIRPA AIR et les Armées.